L'église et le retable

Le nom-même de l’église génère le débat : elle est habituellement connue sous celui de Ste Béatrice (ou Béatrix) alors qu’elle a en réalité été consacrée à St Pierre. La confusion venant en fait de ce qu’elle est l’église d’une paroisse dédiée, elle, à Ste Béatrice.

Sa construction date du XIIIe siècle, pendant la guerre de Cent Ans, à l’époque où les Anglais, après le traité de Brétigny, en 1360, occupaient l’Aunis et la Saintonge.

La paroisse de Landray (désormais écrit Landrais) possédait en 1650 un fief de seigneuries assez important et deux églises rivales : l’actuelle et celle de Saint Jean du Breuil, aujourd’hui disparue.

Cette église romane, comme la plupart des autres édifices religieux, a souffert des guerres. Elle y a perdu son clocher d’origine, reconstruit sur le flanc de la nef en 1848. On estime qu’à l’origine, le clocher surmontait l’entrée de l’église, comme c’est le cas dans de nombreux villages des environs.

Son abside arrondie a également disparu, remplacée par un chevet droit et plat, percé d’une grande fenêtre gothique, aujourd’hui murée, dont il ne reste qu’un petit vitrail rond. Les balustrades originelles du chœur n’existent plus.

La nef, victime d’un incendie, semble-t-il, a été reconstruite, moins élevée que le chœur actuel. Les portes d’entrée latérales, aujourd’hui murées,

étaient réservées au seigneur et aux personnalités de la paroisse. Elles leur permettaient d’accéder directement à leurs places réservées dans le chœur, sans côtoyer le ‘’petit peuple’’ installé dans la nef.

Jusqu’au XVIIe siècle, le cimetière paroissial entourait l’église (à l'arrière et sur l’actuelle place de la mairie), mais les personnalités de la paroisse étaient enterrées à l’intérieur même de l’église. Ainsi, dans la nef et le chœur se trouvent entre autres les sépultures de la famille de Culant (Jacques de Culant a été le dernier seigneur de Landrais, il habitait la maison noble au lieu-dit Le Logis) et de l’abbé François Nicolaï, curé de la paroisse de 1650 à 1711.

Malheureusement, le sol a été refait au début du XXe siècle et aucune trace n’en subsiste.

Si de l’extérieur l’église n’offre qu’une simplicité un peu austère, son autel est par contre remarquable et possède une grande valeur artistique.

Entre 1650 et 1711, le domaine curial était habité par le curé François Nicolaï, qui a administré cette paroisse comme prêtre et officier d’état civil pendant 61 ans et mourut le 22 Février 1711 à l’âge de 89 ans. C’est à ce prêtre que l’on doit une telle œuvre d’art dans une modeste église de campagne : l’intérieur de l’église était à cette époque bien pauvre et l’abbé Nicolaï, ému par l’état de désolation et d’abandon dans lequel se trouvait le lieu saint, entreprit de l’embellir en y faisant dresser le retable que nous admirons aujourd’hui.

Un procès-verbal de l’époque, conservé à l’évêché de La Rochelle, daté du 7 octobre 1686 relate une visite effectuée à l’église de Landrais, sur ordre de l’évêque, et constate la présence d’un autel paré d’un grand retable de pierre sculpté, orné des statues de Sainte Béatrice, de Saint Pierre et de Saint Paul, fait aux dépens du sieur curé, qui avait aussi fait bâtir son presbytère.

Ce retable, en pierre sculptée et peinte de couleurs vives, et de taille imposante (7m50 en hauteur, 6m20 en largeur), est un témoin de l’engouement du XVIIe siècle pour l’art baroque. Si l’identité du commanditaire ne fait aucun doute, l’histoire n’a par contre pas conservé la trace du nom du sculpteur.

Le retable est décoré de deux statues en pierre (St Paul et St Pierre). La troisième statue (Ste Béatrice) en plâtre, est plus récente.

La représentation de la vigne dans le décor illustre le principal moyen de subsistance à cette époque des populations rurales d’Aunis et notamment sur la commune de Landrais.

Ainsi peut-on admirer deux colonnes torses garnies de pampres et de raisins, et d’un petit vendangeur en blouse où l’on dit pouvoir reconnaître le curé lui-même.

Sur celle de droite, on remarque un vigneron, un ange musicien et une salamandre : ce sont des éléments bénéfiques.

Sur celle de gauche, un serpent et une grive qui picore les grains de raisins : ce sont des éléments néfastes.

Le couronnement du retable est décoré d’une colombe de la paix, d’angelots et de pots à feu également en pierre sculptée et peinte.

Ainsi se présentent l’église de Landrais et son remarquable retable baroque, inscrit à l’inventaire des Monuments Historiques de France depuis le 7 mai 1971.